Du Coq À L'Âne (Cet ouvrage a été primé en 2000 aux Prizioù de FR3 Breizh)
Traditions Populaires de Bretagne
Yezhoù al loened
Quand les animaux parlaient...

Chercheur infatigable, véritable "traqueur de mémoires", Daniel Giraudon parcourt la Bretagne depuis un quart de siècle à la recherche de nos traditions populaires.
Ses regards se sont portés en particulier sur la place tenue par l'animal dans la société traditionnelle. Il rassemble aujourd'hui ses recherches dans un ouvrage consacré justement à la faune de Bretagne.
Dans ce bestiaire populaire apparaissent des animaux familiers et domestiques, mais aussi des insectes, des reptiles, des oiseaux avec leurs traits caractéristiques, l'idée que les hommes s'en font, les légendes qui les entourent, auxquelles s'ajoutent des observations de météorologie, de magie, de médecine populaire ; tout cela en bouts-rimés, dialogues, devinettes, formulettes imagées...
L'essentiel de l'ouvrage repose sur un travail minutieux de collecte sur le terrain, mais l'érudition de l'auteur lui permet de recourir aux langues anciennes, aux langues celtiques et aux grandes langues européennes pour de fructueuses comparaisons
En vente dans toutes les bonnes librairies. Remplir fiche sur page Contact pour plus de renseignements par l'auteur.
Voici quelques extraits...
Ses regards se sont portés en particulier sur la place tenue par l'animal dans la société traditionnelle. Il rassemble aujourd'hui ses recherches dans un ouvrage consacré justement à la faune de Bretagne.
Dans ce bestiaire populaire apparaissent des animaux familiers et domestiques, mais aussi des insectes, des reptiles, des oiseaux avec leurs traits caractéristiques, l'idée que les hommes s'en font, les légendes qui les entourent, auxquelles s'ajoutent des observations de météorologie, de magie, de médecine populaire ; tout cela en bouts-rimés, dialogues, devinettes, formulettes imagées...
L'essentiel de l'ouvrage repose sur un travail minutieux de collecte sur le terrain, mais l'érudition de l'auteur lui permet de recourir aux langues anciennes, aux langues celtiques et aux grandes langues européennes pour de fructueuses comparaisons
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Voici quelques extraits...

Sommaire Coq à l'âne | |
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File Type: | doc |
Le Rouge-Gorge

© Photo DG
A-viskoazh eo bet ar Pichiruig, mignon an den ha mignon ar jardiner. Deus ar beure betek an noz e vez gwelet an evn bihan-se o nijal en-dro d'an ti er jardin, o lampat deus an eil barr d'egile pe o lampigellat war an douar, o klask tammoù brujun bara. Fellout a ra deañ beañ mestr war an dachenn. Ne laoskfe hini all ebet deus e gonsorted da dostaat nemet bez e vefe en-kerz amzer an amourousted.
Lamfet ket ar c’hog digant ar yar
Na Yannig ar richodell digant par.
Plijout a ra deañ nem diskwel, un tamm loenig a lorc'h eo. C'hwezhet 'vez pa vez o tiskwel e vruched : "Sellet, emeañ, pegen brav eo livet ma goug !"
Pa deu ar jardiner er-maez eus an ti, e vez diouzhtu war e lerc'h. Gout a oar e vo bromozon ur vuzhugenn pe div da gargañ e gof. War e glud 'vez o c'hortoz pa vez an den kozh o poaniañ gant e bal ha setu an ifrontet o kanañ a daoladoù : -"Ridet eo dit, ridet eo dit, paotr kozh !"
-"Ya ! ridet eo sur, respont ar jardiner kozh, en ur dorchañ e dal..."
Depuis toujours le rouge-gorge a été l'ami de l'homme et surtout l'ami du jardinier. Du matin au soir, on voit ce petit oiseau voleter autour de la maison. Il est chez lui dans le jardin, il saute d'une branche sur l'autre, il sautille au sol à la recherche de quelques miettes. Il ne laisse aucun autre de sa race approcher, sauf s'il s'agit d'une femelle au temps des amours.
On ne séparera pas le coq de la poule,
Ni Jean le rouge-gorge de sa compagne.
Il veut être le maître des lieux. Il aime se montrer; il fait son fier, il bombe le torse : "Regardez, a-t-il l'air de dire, regardez comme mon plastron est bien coloré !"
Quand le vieux jardinier sort de la maison, le rouge-gorge est immédiatement derrière lui. Le petit insectivore et vermivore sait qu'il y aura tout à l'heure quelques larves, un vers ou deux à becqueter. Au jardin, posté sur un perchoir, il attend donc, que le vieil homme pèse et peine sur sa bêche; et voici que le petit drôle se met à chansonner en saccades :"- Tu l'as ridée, tu l'as ridée, mon vieux !"
"- Oui, sûr, elle est ridée !", répond le vieux jardinier en s'essuyant le front.
Lamfet ket ar c’hog digant ar yar
Na Yannig ar richodell digant par.
Plijout a ra deañ nem diskwel, un tamm loenig a lorc'h eo. C'hwezhet 'vez pa vez o tiskwel e vruched : "Sellet, emeañ, pegen brav eo livet ma goug !"
Pa deu ar jardiner er-maez eus an ti, e vez diouzhtu war e lerc'h. Gout a oar e vo bromozon ur vuzhugenn pe div da gargañ e gof. War e glud 'vez o c'hortoz pa vez an den kozh o poaniañ gant e bal ha setu an ifrontet o kanañ a daoladoù : -"Ridet eo dit, ridet eo dit, paotr kozh !"
-"Ya ! ridet eo sur, respont ar jardiner kozh, en ur dorchañ e dal..."
Depuis toujours le rouge-gorge a été l'ami de l'homme et surtout l'ami du jardinier. Du matin au soir, on voit ce petit oiseau voleter autour de la maison. Il est chez lui dans le jardin, il saute d'une branche sur l'autre, il sautille au sol à la recherche de quelques miettes. Il ne laisse aucun autre de sa race approcher, sauf s'il s'agit d'une femelle au temps des amours.
On ne séparera pas le coq de la poule,
Ni Jean le rouge-gorge de sa compagne.
Il veut être le maître des lieux. Il aime se montrer; il fait son fier, il bombe le torse : "Regardez, a-t-il l'air de dire, regardez comme mon plastron est bien coloré !"
Quand le vieux jardinier sort de la maison, le rouge-gorge est immédiatement derrière lui. Le petit insectivore et vermivore sait qu'il y aura tout à l'heure quelques larves, un vers ou deux à becqueter. Au jardin, posté sur un perchoir, il attend donc, que le vieil homme pèse et peine sur sa bêche; et voici que le petit drôle se met à chansonner en saccades :"- Tu l'as ridée, tu l'as ridée, mon vieux !"
"- Oui, sûr, elle est ridée !", répond le vieux jardinier en s'essuyant le front.
La Bécasse

Comme d'autres oiseaux migrateurs la bécasse vient chercher en Bretagne la clémence de notre climat. Après un long périple nocturne, elle s'abat dans les plaines, sur la lisière des forêts, des bois, des taillis, sous les futaies où les feuilles jonchent la terre humide.
C'est sans doute son arrivée en fin d'année qui lui vaut d'être associée à d'autres animaux dans une formule imagée relative à la croissance des jours :
D'an Nedeleg A Noël,
Astenn an deiz paz ur c'hefeleg, Le jour croit du pas d'une bécasse,
D'an deiz kentañ 'bloaz Au premier de l'an
Paz ur waz Du pas d'une oie,
Da ouel ar rouanez, A la fête des rois
Paz ul leue. Du pas d'un veau,
Da ouel Sant-Tomas A la Saint-Thomas
Hirraat an deiz paz un ejen bras Du pas d’un grand bœuf.
La lumière du jour va se faire plus longue à la satisfaction générale. En revanche, la température qui baisse inquiète l'homme de la terre. C'est pourquoi il se réjouit de voir l'automne traîner la jambe pour céder le pas à l'hiver. Il remarque la présence de certains insectes que les frimas n'ont pas encore forcés dans leur retraite saisonnière et il s'exclame d'un air satisfait :
Ur gelienenn da Nedeleg Une mouche à Noël
A zo koulz hag ur c'hefeleg. Vaut autant qu'une bécasse.
C'est sans doute son arrivée en fin d'année qui lui vaut d'être associée à d'autres animaux dans une formule imagée relative à la croissance des jours :
D'an Nedeleg A Noël,
Astenn an deiz paz ur c'hefeleg, Le jour croit du pas d'une bécasse,
D'an deiz kentañ 'bloaz Au premier de l'an
Paz ur waz Du pas d'une oie,
Da ouel ar rouanez, A la fête des rois
Paz ul leue. Du pas d'un veau,
Da ouel Sant-Tomas A la Saint-Thomas
Hirraat an deiz paz un ejen bras Du pas d’un grand bœuf.
La lumière du jour va se faire plus longue à la satisfaction générale. En revanche, la température qui baisse inquiète l'homme de la terre. C'est pourquoi il se réjouit de voir l'automne traîner la jambe pour céder le pas à l'hiver. Il remarque la présence de certains insectes que les frimas n'ont pas encore forcés dans leur retraite saisonnière et il s'exclame d'un air satisfait :
Ur gelienenn da Nedeleg Une mouche à Noël
A zo koulz hag ur c'hefeleg. Vaut autant qu'une bécasse.
L'alouette

En s'élevant à la verticale dans les airs aux premières heures du jour, l'alouette ne fait que reprendre un parcours ancestral. Dans les temps les plus anciens, en effet, lorsque quelqu'un venait à mourir, c'était l'alouette qui descendait sur terre chercher son âme pour lui ouvrir ensuite la porte du ciel. Elle faisait ainsi deux voyages par jour : le matin pour ceux qui décédaient dans la nuit, et le soir pour ceux qui mouraient le jour. Elle était à l'époque dépositaire de la clef du royaume des cieux, comme l'indique l'étymologie populaire de son nom en breton : an alc'houeder, celle qui détient la cléf.
A chaque ascension, comme pour se donner du courage, elle débitait ses trilles à tue-tête. Mais si le gai babil à l'envol plaisait à tous, ce n'était plus le cas lors de la descente et la répétition de ses Diu, Diu, Diu lui coutèrent sa place. Elle fut licenciée par Dieu le père et reçut le surnom de evn touer Doue, "oiseau qui jure le nom de Dieu". Comme on le sait, elle fut remplacée par saint Pierre.
Aujourd'hui encore, elle regrette ce bon vieux temps, mais elle ne renonce pas à retrouver son emploi de portier du paradis, porzhier an neñv. C'est pourquoi elle refait si souvent le voyage vers l'azur, insistant auprès de son remplaçant pour qu'il lui ouvre à nouveau les portes célestes. Dès les premiers coups d'aile, elle se fait suppliante et promet de n'être plus grossière, cherchant à faire vibrer la corde de la miséricorde :
Per, Per, digor an nor din, Pierre, Pierre, ouvre-moi la porte,
Birviken na bec'hin, Jamais plus je ne pécherai,
Digor 'ta, digor, Ouvre donc, ouvre,
Digor din da zor, Ouvre moi ta porte,
Kemer truez ouzin, Prends pitié de moi,
Pe ma goug a dorrin, Ou je me casserai le cou,
Sell an douar, pegen izel, Regarde comme la terre est loin,
Ho, na pegen uhel ! Oh, comme c'est haut !
Saint Pierre qui tient à sa fonction, reste de marbre et ne se laisse pas apitoyer par tant de jérémiades. L'alouette poursuit pourtant sa palabre qui semble interminable. Mais à force de gonfler sa petite poitrine, elle finit par en perdre le souffle et doit se résigner. En plongeant vers le sol comme une pierre, elle jette ses dernières forces pour crier son indignation et se remet à blasphémer :
Bouzar out, Tu es sourd,
Pe ne dout, Ou pas,
Mouzat a rez, Tu boudes,
Hag a rez ! Et comment !
Mat Per, gra da benn, Bon, fais ta tête,
Me zo vont da ziskenn, Je vais descendre,
Hag adarre e pec'hin, Et de nouveau, je pécherai,
Hag e rin , rin, rin, Et je le ferai, oui, oui, oui,
Diu, diu, diu, Diu... Nom de Dieu, nom de Dieu....
A chaque ascension, comme pour se donner du courage, elle débitait ses trilles à tue-tête. Mais si le gai babil à l'envol plaisait à tous, ce n'était plus le cas lors de la descente et la répétition de ses Diu, Diu, Diu lui coutèrent sa place. Elle fut licenciée par Dieu le père et reçut le surnom de evn touer Doue, "oiseau qui jure le nom de Dieu". Comme on le sait, elle fut remplacée par saint Pierre.
Aujourd'hui encore, elle regrette ce bon vieux temps, mais elle ne renonce pas à retrouver son emploi de portier du paradis, porzhier an neñv. C'est pourquoi elle refait si souvent le voyage vers l'azur, insistant auprès de son remplaçant pour qu'il lui ouvre à nouveau les portes célestes. Dès les premiers coups d'aile, elle se fait suppliante et promet de n'être plus grossière, cherchant à faire vibrer la corde de la miséricorde :
Per, Per, digor an nor din, Pierre, Pierre, ouvre-moi la porte,
Birviken na bec'hin, Jamais plus je ne pécherai,
Digor 'ta, digor, Ouvre donc, ouvre,
Digor din da zor, Ouvre moi ta porte,
Kemer truez ouzin, Prends pitié de moi,
Pe ma goug a dorrin, Ou je me casserai le cou,
Sell an douar, pegen izel, Regarde comme la terre est loin,
Ho, na pegen uhel ! Oh, comme c'est haut !
Saint Pierre qui tient à sa fonction, reste de marbre et ne se laisse pas apitoyer par tant de jérémiades. L'alouette poursuit pourtant sa palabre qui semble interminable. Mais à force de gonfler sa petite poitrine, elle finit par en perdre le souffle et doit se résigner. En plongeant vers le sol comme une pierre, elle jette ses dernières forces pour crier son indignation et se remet à blasphémer :
Bouzar out, Tu es sourd,
Pe ne dout, Ou pas,
Mouzat a rez, Tu boudes,
Hag a rez ! Et comment !
Mat Per, gra da benn, Bon, fais ta tête,
Me zo vont da ziskenn, Je vais descendre,
Hag adarre e pec'hin, Et de nouveau, je pécherai,
Hag e rin , rin, rin, Et je le ferai, oui, oui, oui,
Diu, diu, diu, Diu... Nom de Dieu, nom de Dieu....